Une histoire de dos

Longtemps je me suis allongée sur le dos. Il fut un temps de cet allongement où je cherchais des fissures au plafond. Puis un autre où je perdais mon regard dans les volutes d’un tableau accroché sur le mur en face. Et un temps encore plus long où je parlais, parlais, parlais…

Mon dos n’était pas le sujet. Les différentes parties de mon corps qui se rattachaient à ce dos, épaules, fesses, cuisses et jambes, non plus. Le sujet c’était moi, rien qu’en paroles. Tout dans la tête, rien dans le dos.

Ce dos docile se contentait de maintenir un corps à l’horizontale sans que personne ne se soucie de lui. Pourtant c’était bien grâce à cette fonction d’allongement sur un divan que mon Moi pouvait se perdre dans le labyrinthe des pensées, interroger fantasmes et syndromes, convoquer souvenirs et rêves. Sans compter que, dans mon dos, le grand Autre avait pris ses assises, bien campé sur son cul.

Mais quand donc ces deux-là allaient ils se soucier de mon dos ? Ignorants des subtilités du contact que le dos entretenait régulièrement avec la couche familière, ils n’en faisaient qu’à leur tête.

Alors le dos s’en mêla ! Cela commença imperceptiblement, par des fourmillements qui s’aventuraient sur toute sa surface. A mesure que le temps avançait, ces sortes d’impatiences grandirent, à tel point qu’il devint impossible de les ignorer. Quelque chose se passait dans le dos : comme une injonction à se relever et s’enfuir.

Cesser de se prendre la tête, entrainer bras et jambes et partir en courant pour aller voir la mer et faire le tour des montagnes.

L’analyse était terminée, je me relevais bien droite et m’engouffrais dans la vie.

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